CrĂ©ation de lâAgrĂ©gation dâinformatique : il Ă©tait temps !
PubliĂ© par DorothĂ©e Blancheton | Avr 12, 2021 | UniversitĂ©/Recherche | 0 Le 9 mars 2021, Jean-Michel Blanquer a annoncĂ© la crĂ©ation dâune agrĂ©gation dâinformatique pour 2022. Une avancĂ©e que salue Jean-Pierre Archambault, agrĂ©gĂ© de mathĂ©matiques et prĂ©sident de lâassociation Enseignement Public et Informatique (EPI).
Comment accueillez-vous la crĂ©ation de cette agrĂ©gation dâinformatique ?
Câest une bonne chose ! On sâest fĂ©licitĂ© de la crĂ©ation du Capes dâinformatique et, dĂ©sormais, nous nous fĂ©licitons de cette agrĂ©gation car lâune des questions essentielles relative Ă la mise en Ćuvre dâun enseignement, câest la formation des professeurs. On ne va pas « alphabĂ©tiser » toute une gĂ©nĂ©ration sans professeurs formĂ©s. Câest donc une excellente nouvelle de ce point de vue.
La mise en place de cette discipline nâa pas Ă©tĂ© un long fleuve tranquilleâŠ
Non⊠Nous menons des actions pour un enseignement dâinformatique de culture gĂ©nĂ©rale pour tous les Ă©lĂšves depuis des dĂ©cennies. Dans les annĂ©es 80, il y avait une option dâinformatique dans prĂšs de la moitiĂ© des lycĂ©es dâenseignement gĂ©nĂ©ral et qui Ă©tait en voie de gĂ©nĂ©ralisation. Elle a Ă©tĂ© supprimĂ©e en 1992, rĂ©tablie en 1995, et Ă nouveau supprimĂ©e en 1998. Il y a ensuite eu lâĂ©chec prĂ©visible du B2I (Brevet Informatique et Internet, Ndlr), ce « dĂ©sert explicatif ». Nous avons obtenu en 2012 la crĂ©ation dâune option de spĂ©cialitĂ© en Terminale scientifique (Informatique et Sciences du NumĂ©rique, Ndlr) ; et, en 2020, celle de la spĂ©cialitĂ© NSI (NumĂ©rique et Sciences Informatiques) pour les 1Ăšres et Terminales et de SNT (Sciences NumĂ©riques et Technologie) en 2nde pour tous les Ă©lĂšves.
La crĂ©ation du Capes et de lâagrĂ©gation en informatique peut paraĂźtre tardive. Comment lâexpliquez-vous ?
Le combat que nous avons menĂ© peut sembler surrĂ©aliste puisquâil consistait Ă dire que lâinformatique Ă©tait de plus en plus prĂ©sente dans notre sociĂ©tĂ© et que les citoyens devaient y ĂȘtre formĂ©s pour Ă©voluer dans celle-ci. Pourtant cet enjeu sociĂ©tal nâĂ©tait pas perçu comme une Ă©vidence. Lâinformatique nâĂ©tait pas reconnue comme une discipline scientifique au mĂȘme titre que les mathĂ©matiques, les sciences physiques ou les sciences de la vie et de la terre. Il y avait une confusion entre le fait dâavoir un ordinateur chez soi et celui dâenseigner une vraie culture informatique.
LâEPI sâinterroge sur le nombre de postes mis au concours. Pourquoi ?
Pour la session du Capes externe NSI de lâenseignement public, en 2021, le nombre de postes mis au concours, certes en augmentation, nâest que de 60 postes. Outre la spĂ©cialitĂ© NSI en 1Ăšre et Terminale, en Seconde, lâenseignement de SNT reprĂ©sente 1h30 pour tous les Ă©lĂšves. Beaucoup de professeurs de diverses disciplines lâassurent sans nĂ©cessairement avoir la formation le permettant. Il y a vraiment des besoins Ă©normes qui ne peuvent que sâaccroĂźtre si lâon garde la perspective dâun enseignement pour tous.
Vous attendez aussi une reconnaissance officielle de lâinstitution pour les professeursâŠ
Oui. Depuis des annĂ©es, lâenseignement de lâinformatique a Ă©tĂ© possible grĂące aux professeurs qui ont fait dâĂ©normes efforts pour se former, qui ont passĂ© un diplĂŽme inter universitaire⊠La question qui se pose aujourdâhui, câest la reconnaissance institutionnelle des efforts faits par ces professeurs-lĂ . Il ne faut pas les oublier. Dans cette perspective, Capes et agrĂ©gation internes et listes dâaptitude ont un rĂŽle Ă jouer.
En quoi cette reconnaissance est-elle importante ?
Ils en ont besoin pour ne plus ĂȘtre Ă la merci dâune mutation dâoffice, de lâarrivĂ©e dâun collĂšgue⊠Il pourrait y avoir des directives disant que lorsquâun collĂšgue assure lâenseignement de lâinformatique dans un Ă©tablissement, il a la prioritĂ© sur un enseignant qui y est nouvellement affectĂ©. Quant aux nouveaux Capessiens et agrĂ©gĂ©s en informatique, ils pourraient ĂȘtre affectĂ©s de prĂ©fĂ©rence dans les Ă©tablissements sans enseignant dâinformatique pour Ă©largir lâoffre de cet enseignement.
Certaines disciplines comme les mathĂ©matiques peinent Ă recruter. Quid de lâinformatique ?
Il y a une crise de vocation globale. Le mĂ©tier dâenseignant est de plus en plus difficile dans la gestion de la classe, au niveau du (bas) salaire, de la baisse de considĂ©ration. Il reste des Ă©tudiants qui ont la vocation dâenseigner, qui sont sensibles au statut de la fonction publique⊠Mais les conditions ne sont pas lĂ pour une ruĂ©e vers les concours.
Que faut-il encore faire, selon vous, pour valoriser lâinformatique sur le plan scolaire ?
Il faut se donner les moyens de former les personnels pour avoir des ressources humaines dans tous les Ă©tablissements. Nous rĂ©clamons la prĂ©sence de lâenseignement de lâinformatique dans le tronc commun de tous les Ă©lĂšves jusquâau Bac : 1h30 en Seconde câest un bon dĂ©but mais ça ne suffit pas. RĂ©pĂ©tons-le, il y a des besoins Ă©normes par rapport aux demandes existantes et futures.
Il existe une spécialité NSI en 1Úre et Terminale⊠Est-elle insuffisante ?
Tous les Ă©lĂšves ont besoin dans leur culture gĂ©nĂ©rale dâune composante informatique. On est au XXIĂšme siĂšcle. Et puis il faut abandonner en Terminale lâune des trois spĂ©cialitĂ©s choisies en 1Ăšre. Dans la mesure oĂč les maths et la physique sont incontournables pour sâorienter vers les classes prĂ©paratoires aux grandes Ă©coles, il y a une dĂ©perdition du nombre dâĂ©lĂšves en spĂ©cialitĂ© NSI en Terminale sur tout le territoire.
Il y a eu des avancĂ©es Ă©videntes dont on se fĂ©licite mais le nombre de postes et lâobjectif dâun enseignement pour tous les Ă©lĂšves restent des points essentiels Ă dĂ©velopper.