Compte rendu de la rencontre
Le 5 décembre 2017, la Société Informatique de France (SIF) et l'association Enseignement Public et Informatique (EPI) ont été auditionnées dans le cadre de la concertation sur la réforme du baccalauréat, mission pilotée par Pierre Mathiot 1 . La réforme du baccalauréat impliquant une réforme du lycée, la réflexion a porté essentiellement sur l'enseignement de l'informatique au lycée.
Reconnaissance de l'importance de l'enseignement de l'informatique au lycée
Avant lâentretien, nos interlocuteurs avaient reçu une note de lâEPI : "Un enseignement de l'informatique de culture gĂ©nĂ©rale pour tous les Ă©lĂšves. Pourquoi et comment" parue dans le numĂ©ro 11 de 1024, le bulletin de la SIF.
DĂšs le dĂ©but de l'entretien, ils ont actĂ© l'importance de l'informatique et de son enseignement au lycĂ©e en tant que composante de la culture gĂ©nĂ©rale scolaire de tous les Ă©lĂšves au 21e siĂšcle. La problĂ©matique informatique est donc bien prĂ©sente dans la rĂ©flexion ministĂ©rielle engagĂ©e autour de la rĂ©forme du baccalaurĂ©at. Nous avons demandĂ© que le cap soit fixĂ© pour la mise en Ćuvre de cet enseignement, avec des Ă©chĂ©ances prĂ©cises Ă long, moyen et court termes. Nous avons argumentĂ© que la situation exceptionnelle de l'informatique, qui n'est toujours pas une discipline au mĂȘme titre que les mathĂ©matiques ou la physique au lycĂ©e, requĂ©rait un « plan» spĂ©cial pour son introduction pour tous les Ă©lĂšves et nĂ©cessitait des mesures urgentes pour la formation d'enseignants spĂ©cialistes de cette discipline, Ă savoir la crĂ©ation d'un Capes et d'une agrĂ©gation d'informatique.
Majeures et mineures envisagées
Un certain nombre de mesures envisagées par la mission de réforme du baccalauréat nous ont été présentées :
De la Seconde à la Terminale, les élÚves se spécialiseraient progressivement, avec détermination en Seconde, puis spécialisations dÚs la PremiÚre.
Le lycée comporterait un tronc commun avec, entre autres :
- un parcours mathématiques-informatique avec deux disciplines « majeures », les mathématiques d'une part, l'informatique d'autre part (3 heures par semaine en premiÚre, 6 heures en Terminale, pour chaque majeure) ;
- une « mineure » informatique proposĂ©e dans les autres parcours scientifiques ; en effet l'informatique fait Ă©voluer l' « essence » des autres disciplines (objets, mĂ©thodes et outils ; c'est par exemple le cas aujourd'hui de pans entiers de la biologie, de la mĂ©decine, de la physique) et doit donc ĂȘtre maĂźtrisĂ©e par tous les scientifiques.
Nous nous réjouissons de la création d'un parcours mathématiques - informatique qui répondrait bien à la nécessité de former des lycéens qui pourront se spécialiser ensuite à l'université (licence d'informatique, IUT) pour devenir les futurs cadres / ingénieurs / chercheurs en informatique, dont la France a besoin.
- Nous avons demandé également que l'informatique figure dans les parcours de tous les élÚves, pour la formation du citoyen et l'évolution de tous les métiers (anciens et nouveaux, du médecin au mécanicien en passant par le professeur des écoles qui doit initier ses élÚves à l'informatique, et aussi dans les sciences humaines et sociales) : en Seconde dans le tronc commun puis sous la forme d'une « mineure » adaptée à chacun des parcours.
Programmes
Concernant les programmes de ces majeures et mineures, il est clair qu'ils devront s'appuyer sur les "attendus" des universités. Le programme de l'option de spécialité actuelle en Terminale S Informatique et Sciences du Numérique (ISN) constitue une référence solide. Nous avons également indiqué que depuis plus d'un an, un groupe de travail (GT) comportant des membres des sociétés savantes de mathématiques, physique, chimie, informatique (SIF), biologie, et des membres des associations de professeurs du secondaire, se réunissait et réfléchissait sur des propositions de programmes de sciences, tant pour tout lycéen (quelle que soit sa poursuite d'études dans le supérieur) que pour les futurs scientifiques 2 .
Les épreuves du Baccalauréat
Les deux majeures seraient évaluées en Terminale, juste avant les vacances de printemps : l'avantage de ce calendrier est que les résultats seraient disponibles pour l'orientation dans le Supérieur). à cela seraient ajoutées deux épreuves en fin d'année : une épreuve de philosophie et un "grand oral" de culture scientifique sur un sujet travaillé en relation avec les deux disciplines majeures de l'élÚve.
Calendrier prévisionnel de la réforme
La réforme serait mise en place à la rentrée 2018 en Seconde : réagencement des rythmes, programmes inchangés. En 2019, ce serait la montée en PremiÚre et des nouveaux programmes en Seconde, puis en 2020 en Terminale avec le nouveau bac en fin d'année scolaire.
Formation des enseignants d'informatique
On ne peut donner sa nĂ©cessaire place Ă la discipline informatique sans enseignants spĂ©cialistes. Or, il n'y a actuellement pas de professeurs d'informatique d'enseignement gĂ©nĂ©ral. Il faut en former comme le systĂšme Ă©ducatif forme les professeurs des autres disciplines. Cela signifie qu'il faut crĂ©er sans attendre un Capes et une agrĂ©gation d'informatique. M. Mathiot nous a dit que la crĂ©ation d'une agrĂ©gation d'informatique Ă©tait Ă l'Ă©tude. Pour le programme de cette agrĂ©gation, nous leur avons suggĂ©rĂ© de partir des programmes des options des trois agrĂ©gations : option informatique en MathĂ©matiques, ingĂ©nierie informatique en Sciences Industrielles et de l'IngĂ©nieur, et SystĂšmes d'information en Ăconomie-gestion 3.
Il faut aussi prĂ©voir des solutions transitoires pour le court terme dans le cadre de la formation continue de certains enseignants en poste. Pour cela, il faut une vĂ©ritable formation continue Ă l'informatique s'Ă©talant sur une annĂ©e, voire deux, comme il a Ă©tĂ© fait dans certaines acadĂ©mies lors de l'introduction d'ISN. Les membres de la mission ont Ă©voquĂ© le recours possible Ă des professionnels de lâinformatique en reconversion vers lâenseignement, et le soutien d'entreprises d'informatique (par exemple avec des PAST ou un mĂ©cĂ©nat d'entreprise), pour participer Ă cet effort nĂ©cessaire Ă lâintroduction dâun enseignement de lâinformatique dans tous les parcours. Toutefois, ces professionnels, pour ĂȘtre pleinement opĂ©rationnels, devraient ĂȘtre accompagnĂ©s sur le plan pĂ©dagogique. Nous avons indiquĂ© que les doctorants en informatique qui inscrivent dans leur contrat doctoral une mission d'enseignement (anciens assistants moniteurs), pourraient Ă©galement contribuer Ă cet enseignement ou Ă l'accompagnement de professeurs en cours de formation Ă l'informatique. Enfin, il faudrait officialiser les compĂ©tences des professeurs qui enseignent ISN et ICN.
En conclusion, la SIF et l'EPI ont apprĂ©ciĂ© le climat d'Ă©changes constructifs et la rĂ©ceptivitĂ© des membres de la commission aux propositions qu'elles leur ont faites. Elles insistent sur la fait qu'il est essentiel et urgent de proposer dĂšs Ă prĂ©sent des solutions transitoires pour pallier l'absence de professeurs d'informatique, et de mettre en Ćuvre sans attendre la crĂ©ation d'un corps d'enseignants d'informatique (Capes et agrĂ©gation). C'est une condition sine qua non de rĂ©ussite de l'objectif sociĂ©tal d'un enseignement de l'informatique de culture gĂ©nĂ©rale pour tous les Ă©lĂšves et de formation des futurs ingĂ©nieurs dans le domaine de l'informatique et le numĂ©rique.
Association Enseignement Public et Informatique (EPI)
Société Informatique de France (SIF)
Paris, le 9 décembre 2017
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Ont participé à la rencontre Jean-Pierre Archambault, président de l'EPI, Christine Froidevaux, vice-présidente de la SIF et Philippe Marquet, vice-président enseignement de la SIF.
- Ce GT sera reçu le 11 décembre.
    3 Voir le communiquĂ© de la SIF dâavril 2017 : http://www.societe-informatique-de-france.fr/wp-content/uploads/2017/04/2017_03-Communique%CC%81-SIF-Agregation.pdf